Lettre d'information : Propriété Intellectuelle / Numérique, Tech et Données n° 161 (Décembre 2023)
Direction Technique Droit Economique

Des parfums et produits cosmétiques de luxe ne sont pas librement revendables sans l’autorisation du titulaire de la marque

Cass. Com., 6 décembre 2023, n° 20-18.653
 
Par un arrêt publié au Bulletin, rendu le 6 décembre 2023, la Cour de cassation est venue confirmer qu’un tiers ne pouvait pas librement proposer à la vente des parfums et produits cosmétiques de luxe sur lesquels est explicitement inscrite une mention « Ne peut être vendu que par les dépositaires agréés ».
 
Dans cette affaire, une personne physique, ayant acquis gratuitement des échantillons de ces produits auprès d’un premier revendeur agréé, membre du réseau de distribution du titulaire de la marque, les avait ensuite cédés à une enseigne de vente de produits d’occasion et reconditionnés, avant que cette dernière ne les propose elle-même à la vente à ses clients, dépourvus de leur emballage d’origine.
 
Le titulaire de la marque faisait valoir que cette vente n’était pas autorisée et constituait, ce faisant, un acte de contrefaçon. En défense, l’enseigne suspectée de contrefaçon invoquait le mécanisme de l’épuisement des droits sur la marque, prévu par l’article L. 713-4 du CPI, selon lequel « le droit exclusif du titulaire d'une marque de consentir à la mise sur le marché d'un produit revêtu de sa marque, qui constitue l'objet spécifique du droit de marque, s'épuise par la première commercialisation de ce produit avec son consentement ».
 
Cette décision donne à la Cour de cassation l’opportunité de revenir sur les deux volets du mécanisme de l’épuisement des droits.
 
D’une part, la haute juridiction rappelle qu’au regard d’une décision L’Oréal rendue par la CJUE en 2011, il a été jugé que « la fourniture par le titulaire d'une marque, à ses distributeurs agréés, d'objets revêtus de celle-ci, destinés à la démonstration aux consommateurs dans les points de vente agréés, ainsi que de flacons revêtus de cette marque, dont de petites quantités peuvent être prélevées pour être données aux consommateurs en tant qu'échantillons gratuits, ne constitue pas, en l'absence d'éléments probants contraires, une mise dans le commerce ».
 
En effet, la condition essentielle de la mise en œuvre du mécanisme de l’épuisement des droits consiste en une « première commercialisation » avec le consentement du titulaire. En l’occurrence, la remise d’échantillons gratuits à la personne physique n’équivalait pas à une première commercialisation faite avec l’autorisation du titulaire.
 
D’autre part, elle rappelle que le deuxième alinéa de l’article L. 713-4 prévoit que même dans l’hypothèse d’une première vente licite (donc autorisée par le titulaire de la marque), « faculté reste ouverte au titulaire de la marque de s'opposer à tout nouvel acte de commercialisation, s'il justifie de motifs légitimes, tenant notamment à la modification ou à l'altération, ultérieurement intervenue, de l'état des produits ».
 
Or, dans le cas d’espèce, les échantillons litigieux étaient bien revendus par l’enseigne sans l’emballage d’origine, ce qui avait pour conséquence d’entraîner une altération des produits « gravement préjudiciable à l'image de la société […] et à l'univers de luxe et de pureté qu'elle véhicule ».
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